Le Dr François CHERIFI, oncologue médical au Centre Baclesse, s’est vu décerner une prestigieuse bourse par Gilead Sciences lors de l’ESMO 2025. Dotée de 180 000 dollars, cette récompense permettra de financer, pendant deux ans, des travaux innovants sur le cancer du sein triple négatif, une forme particulièrement agressive de cancer du sein.
Contexte : le cancer du sein triple négatif, un défi majeur
Le cancer du sein est le plus fréquent chez la femme, avec près de 2,3 millions de nouveaux cas chaque année dans le monde et 670 000 décès. Parmi ses formes, le cancer du sein triple négatif se distingue par sa gravité :
- Il représente le sous-type le plus agressif des cancers du sein.
- Le risque de récidive est plus élevé que pour les autres formes et la mortalité reste élevé.
- Les femmes jeunes le développent plus souvent.
Il est le plus souvent lié aux formes familiales avec les mutations des gènes BRCA.
Nouveaux traitements : les inhibiteurs de PARP et leurs enjeux
Face à ce type de cancer, les inhibiteurs de PARP constituent une avancée thérapeutique prometteuse. Ils sont prescrits en situation métastatique et adjuvante pour les patientes présentant une mutation germinale de BRCA.
Une mutation germinale est une modification de l’ADN concernant l’ensemble des cellules des patientes (contrairement aux mutations tumorales survenant uniquement dans les cellules cancéreuses. Les patientes ayant une mutation BRCA germinale ont une fragilité des mécanismes de réparations de l’ADN (recombinaison homologue notamment) rendant les inhibiteurs de PARP très efficace.
Toutefois, les dernières recherches dans le domaine montrent une efficacité même en l’absence de mutation BRCA germinale, posant la question cruciale du bon ciblage des patientes : il devient nécessaire d’identifier précisément qui pourrait bénéficier de ces traitements innovants et bien tolérés.
Le projet récompensé : vers un test compagnon pour personnaliser les traitements
Le projet du Dr François CHERIFI, intitulé « Évaluation du déficit de recombinaison homologue et de la réponse aux inhibiteurs de PARP dans le cancer du sein triple négatif à l’aide d’organoïdes tumoraux dérivés de patientes et d’un test compagnon diagnostic », vise à répondre à ce besoin.
Son objectif : créer et valider un test compagnon capable d’orienter le choix du traitement pour chaque patiente.
Ce travail repose sur plusieurs axes complémentaires :
- Analyser l’efficacité des inhibiteurs de PARP à l’aide de modèles innovants, notamment des organoïdes issus de patientes, afin d’identifier de nouveaux marqueurs permettant de prédire la réponse au traitement.
- Tester et comparer plusieurs méthodes d’évaluation du statut HR (recombinaison homologue) : séquençage de l’ADN, score GIScar, test fonctionnel RECAP sur les organoïdes tumoraux, et mise en relation de ces résultats avec la sensibilité aux inhibiteurs de PARP lors de l’exposition directe des organoïdes aux traitements.
- Développer et optimiser les modèles d’étude : dans un premier temps, des organoïdes issus de xénogreffes* de patientes atteintes de cancer du sein triple négatif seront utilisés pour « roder » et comparer les différentes méthodes d’évaluation du statut HR. Dans un second temps, les analyses seront répliquées sur des organoïdes dérivés directement des patientes, fournis via l’étude TRIPLEX du Centre Baclesse, afin de confirmer et affiner les résultats obtenus.
- Explorer en profondeur les mécanismes biologiques : une analyse fine des marqueurs et mécanismes associés à la sensibilité (mais aussi à la résistance) aux inhibiteurs de PARP sera réalisée (voir schéma de l’étude ci-dessous).
Une collaboration d’excellence et une reconnaissance internationale
Ce projet est rendu possible grâce à une collaboration unique entre le Centre Baclesse, la plateforme ORGAPRED (ANTICIPE), Cancer and Brain Genomic (INSERM 1245) et l’Institut Curie. Il est piloté par le Dr François CHERIFI, sous la direction du Dr Georges ÉMILE et de Louis-Bastien WEISWALD, experts reconnus en oncologie et biologie des tumeurs.
Cette bourse de 180 000 dollars, octroyée dans le cadre du « Research Scholar Programme » de GILEAD, témoigne de la qualité et du rayonnement de cette étude menés à Caen, au bénéfice de patientes atteintes d’un cancer du sein triple négatif. Un pas de plus vers la médecine personnalisée et l’espoir d’améliorer significativement la prise en charge et le pronostic des femmes concernées.
Une xénogreffe consiste à utiliser un greffon, c’est-à-dire un organe, tissu ou cellule, prélevé sur un animal pour le transplanter chez un humain ou entre deux espèces vivantes différentes. Cette technique est utilisée dans l’étude afin de pouvoir tester les traitements sur un plus grand nombre d’organoïdes.
