Le 14 novembre 2022, à Paris, lors de la Convention nationale des Centres de lutte contre le cancer, s’est déroulée la 8e Remise des Prix Unicancer de l’Innovation. Le Dr Raphaël LEMAN, biologiste au Laboratoire de biologie et de génétique du cancer du Centre François Baclesse de Caen et le Dr Dominique VAUR, responsable du Laboratoire, ont reçu le Prix Unicancer dans la catégorie « Accès à l’innovation » grâce à leur test GIScar (Genomic Instability Scar). Ce trophée leur a été remis par la Pr Frédérique PENAULT LLORCA, présidente déléguée d’Unicancer.
GIScar, c’est quoi ?
Un nouveau test génétique pour identifier les patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire agressif, dont la tumeur peut être traitée par thérapie ciblée.
GIScar, pour « Genomic Instability Scar » (En français : Cicatrice d’instabilité génomique), est le tout premier test académique de biologie moléculaire développé en France qui permet d’orienter la prise en charge thérapeutique des femmes atteintes d’un cancer agressif de l’ovaire (cancer séreux de haut-grade), pour les faire bénéficier d’un traitement par thérapie ciblée.
Son principe de fonctionnement
Les cancers agressifs de l’ovaire présentant un déficit de réparation de l’ADN par recombinaison homologue (HDR) sont sensibles à l’association bévacizumab et olaparib (cela a été démontré par l’essai PAOLA-1).
Ces défauts de réparation génèrent des cicatrices génomiques tumorales.
Après une biopsie de la tumeur, cette nouvelle méthode de séquençage à haut-débit d’un panel de gènes, permet de détecter ces cicatrices, et donc d’identifier les patientes pouvant bénéficier d’une thérapie ciblée par olaparib.
A qui s’adresse-t-il ?
Les cancers de l’ovaire en France représentent 5200 nouveaux cas par an (chiffres INCa 2022). Le cancer de l’ovaire débute souvent silencieusement. Aussi, la grande majorité des patientes sont diagnostiquées à un stade avancé de leur cancer.
La population concernée par le test GIScar représente environ 4 000 femmes par an. Les premiers résultats suggèrent qu’une patiente testée sur deux pourrait tirer bénéfice de ce traitement ciblée par « inhibiteurs de PARP ».
Quel bénéfice pour les patientes concernées ?
« Auparavant, on ne proposait le nouveau traitement par inhibiteur de PARP qu’aux femmes atteintes d’un cancer de l’ovaire, qui présentaient des mutations dans les gènes BRCA1 et BRCA2 responsables d’une prédisposition aux cancers du sein et/ou de l’ovaire. GIScar permet de proposer un traitement efficace à environ deux fois plus de femmes atteintes d’un cancer agressif de l’ovaire, que si on ne cherchait que les mutations génétiques des gènes BRCA1 et BRCA2.
Les patientes dont la tumeur de l’ovaire est positive au test GIScar et sont traitées par inhibiteur de PARP voient leur survie globale doubler », explique Raphaël LEMAN, biologiste au Centre Baclesse.
En quoi ce test est-il innovant ?
Outre sa précision pour cibler les patientes pouvant bénéficier d’un traitement par bévacizumab et olaparib, il peut être aisément mis en œuvre dans les laboratoires, en particulier ceux des centres de lutte contre le cancer, pour un coût maîtrisé.
Ayant été développé dans un but académique, pour faire avancer la science et non pour des raisons commerciales, GIScar peut être mis à disposition des autres établissements de santé grâce à une solution SAAS (Sofware As A Service), rendant sa diffusion aisée.
GIScar, une initiative académique collaborative
Ce projet, sous l’égide du laboratoire de biologie et de génétique du cancer du Centre François Baclesse, dirigé par le Dr Dominique VAUR, a été développé en collaboration avec les centres de lutte contre le cancer d’Angers (Institut de Cancérologie de l’Ouest), de Villejuif (Institut Gustave Roussy), de Lille (Centre Oscar Lambret) et l’hôpital de la Pitié-Salpétrière. Ces collaborations nous ont permis d’augmenter le nombre de prélèvements pour la validation de la technique GIScar et d’évaluer sa robustesse sur des tumeurs séquencées par d’autres laboratoires que le nôtre.
Ce travail n’aurait pu être réalisé sans le soutien du groupe de recherche ARCAGY-GINECO, qui a mis à notre disposition 469 ADN de patientes de l’étude PAOLA-1.
GIScar, un test reconnu
Le test GIScar a été validé avec succès au niveau technique par comparaison avec la méthode de référence et au niveau clinique grâce aux données d’ARCAGY-GINECO. Il a également fait l’objet d’une communication orale aux Assises de génétique de 2022, d’une communication affichée à l’European Human Genetics Conference 2022 (ESHG) et d’une présentation au congrès 2022 de l’European Society of Gynaecological Oncology (ESGO)
« Nous avons souhaité mettre à disposition de nos collègues des hôpitaux français un test facilement accessible et peu couteux leur permettant de faire bénéficier les femmes atteintes d’un cancer de l’ovaire d’un traitement innovant particulièrement efficace. Le prix reçu aujourd’hui illustre la pertinence de notre démarche de recherche permanente de l’innovation qui est dans l’ADN des centres de lutte contre le cancer. », explique le Dr Dominique VAUR, chef du laboratoire de biologie et de génétique du cancer du Centre Baclesse.
« Nous sommes particulièrement fiers et honorés de recevoir une distinction nationale qui est une reconnaissance de l’excellence de notre travail quotidien, au service des patients », indique Pr Marc-André MAHE, directeur général du Centre Baclesse.